C'est évident : la nostalgie est un étrange sentiment. Capable de figer un passé vidé de toutes les lourdeurs du quotidien, elle nous fait croire que la routine n'existait pas en son sein.
Et quand le hasard ou d'autres obligations nous ramène sur son territoire pour quelques jours, la tentation est grande de ressortir une carte tirée de nos souvenirs. Juste pour vérifier si les allées tracées dans notre mémoire en sont encore des reflets fidèles.
En prenant de la hauteur, sur cette colline gravie au hasard d'une première balade de prérentrée, une douce quiétude persiste. Le temps est suspendu, les rues toujours aussi paisibles.
Plus bas, tel bar passe encore des playlists d'enfer et tel bistrot en face propose ses bonnes recettes à midi : nous voilà rassurés, rien n'a bougé depuis l'an passé !
Il faut nuancer après quelques détours : telle locale où on avait fait ses armes n'est maintenant plus là, remplacée par une boutique de télécom'. Quant à ce caveau à chichas dans lequel les nuits s'étiraient, définitivement fermé.
Mais le plus important, ce sont toujours les gens. Ceux qui n'ont pas bougé, ceux qui se sont accordés un aller-retour étalé sur quelques années, et ceux qui pour la plupart sont partis pour ne plus revenir.
En recroiser certains est toujours l'occasion d'échanger avec plaisir sur ce que la vie a charrié chacun de son côté. Le plus souvent autour d'un verre de bière.
C'est alors que revient sans prévenir John Frusciante, le guitariste rescapé de tout qui revendiquait dans son troisième album n'avoir enregistré que de l'eau pendant dix jours :
Et on réalise alors que ces parenthèses maltées ne sont peut-être qu'une petite goutte dans un grand océan.